Nous sommes tous des artistes créateurs !
Plus de 500 jours de nĂ©gociations pour faire un gouvernement. Ă raison d’un recueil par jour, c’est comme si vous lisiez trois fois la ComĂ©die humaine… De quoi creuser l’Ă©tude des moeurs et l’Ă©tude philosophique de l’oeuvre… SurrĂ©aliste ? Peut-ĂȘtre, mais cela n’a pas empĂȘchĂ© notre pays d’Ă©voluer…
Le 6 octobre dernier, une lettre de l’ONEM est venue toquer Ă la porte des artistes. De nouvelles rĂšgles pour l’accĂšs et la prolongation d’un statut qui n’en est pas un. Un courrier qui prĂ©pare les jours tristes Ă venir… Sans rentrer dans les dĂ©tails, il faut bien constater que ces nouvelles dispositions ont Ă©tĂ© reçues comme une baffe par les artistes crĂ©ateurs et les techniciens. Les artistes de spectacle sont, pour l’heure, Ă©pargnĂ©s…
Mais au fait, quelle est la diffĂ©rence entre un artiste de spectacle et un artiste crĂ©ateur ? Demander Ă l’ONEM, ils vous expliqueront quels sont les mĂ©tiers qui dĂ©pendent des arts vivants et quels sont ceux qui ne le sont pas… Des distinctions qui n’ont pas de sens puisque le vrai-faux statut de l’artiste n’existe pas. Il est liĂ© Ă une rĂšgle de maintien du montant des allocations de chĂŽmage pour tout travailleur qui arrive Ă dĂ©montrer une activitĂ© d’intermittente.
AprĂšs, cela devient technique : qui peut faire valoir la rĂšgle du cachet, qui peut avoir accĂšs Ă ces avantages s’il sort d’un emploi temps plein… Pour plus d’info, contactez votre syndicat, une association de soutien aux artistes, un bureau social pour artistes… Ils ont tous leurs propres lectures du bazar… et avec les nouvelles dispositions, c’est encore moins clair… Les avis divergent.
Mais aujourd’hui, l’ONEM rĂ©introduit une distinction entre les mĂ©tiers de la crĂ©ation… Y compris dans le spectacle. Dans un document interne, l’ONEM classe les diffĂ©rents mĂ©tiers entre artistes crĂ©ateurs, artistes de spectacle ou artiste de rien du tout. IntĂ©ressant d’y lire, par exemple, qu’un conteur ou un metteur en scĂšne est un artiste crĂ©ateur… Un grimeur est un artiste de spectacle, bonne nouvelle pour lui. Un compositeur de musique pas… Tant pis pour lui.
Dans les artistes de rien du tout, il y a les figurants et… les maquilleurs… Ah bon ? N’Ă©taient-ils pas artistes crĂ©ateurs ?
Ne nous cachons pas la face. Les nouvelles dispositions de l’ONEM, mal Ă©crites et maladroites, ont un objectif mi-avouĂ©: limiter les dĂ©penses et vider les artistes crĂ©ateurs de l’enveloppe: « artistes de spectacle ».
Attention, avec le magnifique effort budgĂ©taire que nous ont concoctĂ© les nĂ©gociateurs fĂ©dĂ©raux, il y a fort Ă parier que l’exception de l’intermittence risque de valser en dehors du systĂšme emploi-chĂŽmage… Si vous lisez l’accord gouvernemental et la partie sur les changements autour de la dĂ©gressivitĂ© du chĂŽmage rien ne concerne les intermittents. Ă moyen terme, tous les artistes intermittents sont concernĂ©s.
Les nouvelles dispositions n’Ă©taient qu’une amorce aux rĂ©formes. Un premier essai pour voir jusqu’oĂč la rĂ©volte du secteur pourrait aller ? Une prise de pouls pour sentir comment nous, les artistes, nous nous mobiliserons.
Comment ne pas y voir une tentative d’Ă©crĂ©mage destinĂ©e Ă ne pas se trouver face Ă la masse des 17 000 personnes qui bĂ©nĂ©ficient de ce « statut » et qui, le moment venu des grandes rĂ©formes, se rĂ©veilleront d’un coup ? DĂ©sunir avant la bataille.
Mais ne tombons pas dans la paranoĂŻa excessive… Que peut-on faire ?
Il est temps de dĂ©fendre nos droits ensemble. De nous fĂ©dĂ©rer et de prĂ©parer les vagues de morositĂ©. Nous sommes tous des crĂ©ateurs et nous participons Ă des rĂ©alisations collectives. Nous voulons pouvoir continuer Ă exister et nous exprimer, surtout dans un monde qui manque de perspective. Il faut refuser les volontĂ©s de classification de l’ONEM et maintenir le droit aux intermittents Ă exercer un travail ponctuel sans distinction de concept de crĂ©ation artistique. Pourquoi un graphiste liĂ© Ă la vie d’une compagnie de théùtre n’aurait-il pas le droit de bĂ©nĂ©ficier des mĂȘmes faveurs qu’un comĂ©dien ? Il dĂ©pend, lui aussi, du caractĂšre intermittent du spectacle. Pourquoi un technicien n’a pas le droit de faire valoir la rĂšgle du cachet ? Ne travaille-t-il pas, lui aussi, Ă la prestation ?
Ce n’est pas une comĂ©die, mais une tragĂ©die qui se joue dans les jours qui arrivent. Une tragĂ©die pour tous ceux qui ont cru, qu’aprĂšs avoir travaillĂ© pendant 18 mois dans le spectacle, ils pourraient avoir droit aux mĂȘmes avantages que les autres. Ils ont Ă©tĂ© refusĂ©s parce que leurs tĂąches, si elles sont liĂ©es aux spectacles, ne sont pas assimilĂ©es Ă des actes crĂ©atifs ou parce que leur diplĂŽme les destine obligatoirement Ă devenir indĂ©pendants.
Une tragĂ©die pour ceux qui rentrent des contrats de prolongation et que l’ONEM n’arrive pas Ă interprĂ©ter justement en ne considĂ©rant pas qu’un artiste, pour vivre, se doit de travailler de maniĂšre intersectorielle.
Mesdames, messieurs de l’ONEM arrĂȘtez de vouloir mettre les intermittents dans des cases! Rendormez-vous ou prenez le temps de lire 3 fois la ComĂ©die humaine… Comme le rĂ©pondait la ministre de tutelle interpellĂ©e au parlement, n’Ă©tiez-vous pas sous le rĂ©gime d’un gouvernement en affaires courantes ?
Info : les députées fédérales Ecolo Muriel Gerkens, Zoé Genot et Groen, Meyrem Almaci, ont déposé fin 2011 une proposition de loi améliorant le statut des artistes. Pour en savoir plus : communiqué de presse.