Ne pas crier Victor !

Publié le 22/06/13
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La commission de concertation de l’enquĂȘte publique pour le projet Victor aurait dĂ» se tenir fin mai. Mais, suite Ă  une dĂ©cision unilatĂ©rale de la commune de Saint-Gilles, cette rĂ©union de la commission n’a pas Ă©tĂ© convoquĂ©e et l’enquĂȘte publique dans son ensemble a Ă©tĂ© annulĂ©e. La demande de permis est donc maintenant “suspendue” dans un vide juridique. La commune ne pouvant normalement pas, d’autoritĂ©, dĂ©cider de ne pas mener Ă  bien une enquĂȘte publique requise par les procĂ©dures. Ce n’est pas du tout prĂ©vu par le Cobat (Code bruxellois de l’amĂ©nagement du territoire). Et impossible de dĂ©livrer ou refuser un permis sans que l’enquĂȘte publique ait Ă©tĂ© menĂ©e Ă  terme.

capture VictorPour rappel, le projet Victor, portĂ© par le promoteur Atenor, consiste en l’érection de trois tours (dont une de 150 m de haut) et un plus petit immeuble, juste Ă  cĂŽtĂ© de la tour du Midi Ă  proximitĂ© directe de la gare du Midi. L’affectation demandĂ©e est de 100.000 m2 de bureaux pour 6.000 m2 de logements seulement (qui plus est, des studios, pour l’essentiel). Quelques rez commerciaux sont Ă©galement au programme. Le projet a fait l’objet d’une Ă©tude d’incidences de 900 pages.

Picqué fait du zig-zag entre les tours

La “mise au frigo” de ce projet est de prime abord une bonne nouvelle. Depuis le dĂ©part, le projet suscite une forte opposition de la part des comitĂ©s de quartier et des associations (voir les pages “Victor” d’IEB, du Codes et du comitĂ© de quartier “L’ombre des tours”). Avec la locale de Saint-Gilles, je me Ă©galement suis toujours opposĂ© Ă  ce projet : trop de bureaux (alors qu’il y a plĂ©thore de bureaux dans la RĂ©gion et manque de logements; risque de “zone morte” le soir et le WE quand les bureaux sont fermĂ©s,
), gabarits disproportionnĂ©s par rapport aux quartiers environnants, projets Ă  Ă©valuer au regard de tous les autres projets dans la zone et nĂ©cessitant d’ĂȘtre inscrit dans une panification globale, etc. J’avais fait le point fin 2011 sur Victor et les enjeux dans la zone dans cet article.

Bonne nouvelle, donc. Le permis pour Victor ne sera pas dĂ©livrĂ©. En tout cas Ă  court terme. Mais la maniĂšre pose question. Lors du dĂ©bat que j’ai amenĂ© au Conseil communal le 23 mai dernier, en interpellant le CollĂšge, le Bourgmestre a tout Ă  fait assumĂ© : la commune de Saint-Gilles ne veut pas instruire le dossier, alors que la RĂ©gion s’est lancĂ©e dans l’élaboration d’un schĂ©ma directeur pour toute la zone Midi, dont on attend les conclusions pour dans quelques mois. Quitte Ă  ĂȘtre en porte-Ă -faux par rapport aux procĂ©dures lĂ©gales. Un revirement pour le moins Ă©trange: jusqu’ici, la commune de Saint-Gilles a fortement soutenu le projet Victor, notamment en abrogeant le PPAS (Plan particulier d’affectation du sol) “France”, ce qui a eu pour effet de diminuer les contraintes sur les gabarits, ainsi que sur les obligations en logements. Un tapis rouge pour Victor
 On peut supputer sur les raisons qui ont amenĂ© Ă  ce changement de cap, mais notons nĂ©anmoins que celles qui sont mises en avant officieusement et officiellement, comme l’insuffisance de logements dans le projet et la nĂ©cessitĂ© d’attendre un plan global pour le quartier, sont celles des opposants au projet depuis le dĂ©part. Or, la commune rabroue ces opposants et a laissĂ© filer les procĂ©dures depuis prĂšs de deux ans
 Par ailleurs, Saint-Gilles ne va pas jusqu’au bout de sa nouvelle logique; si c’était le cas, elle aurait menĂ© la procĂ©dure Ă  son terme et refusĂ© le permis, ce qu’elle s’est bien gardĂ©e de faire.

L’autoritĂ© du serpent Kaa

Notons encore que ce permis doit ĂȘtre dĂ©livrĂ© Ă  la fois par la commune de Saint-Gilles et celle d’Anderlecht, le projet Ă©tant Ă  cheval sur ces deux communes. Et, du cĂŽtĂ© d’Anderlecht, d’aprĂšs les rĂ©ponses fournies Ă  l’interpellation de mon collĂšgue Ecolo Philippe Debry, on ne voit pas les choses de la mĂȘme maniĂšre: la majoritĂ© PS-MR veut, lĂ , faire avancer le projet et relancer une nouvelle enquĂȘte publique rapidement.

Quoi qu’il en soit, une extrĂȘme vigilance reste de mise. Charles PicquĂ©, serpent Kaa Ă  ses heures, excelle dans les techniques d’endormissement des contestations. Et les rĂ©cents revirements saint-gillois pourraient ĂȘtre vus comme tels.